Le poing levé

Quand on ne peut plus ouvrir sa main, on lève son poing

Dernier livre lu : l’Economie du Bonheur de Claudia Senik

Dernier livre lu : l’Economie du Bonheur de Claudia Senik

Qu’est que j’ai retenu de ce livre ? Déjà que j’approche du pic de mal-être. 45 ans c’est l’âge où l’on se sent le moins heureux pour les hommes, c’est l’âge où le taux de suicide est le plus élevé aussi. Va falloir que je franchisse ce cap…

Ça c’était un point tous à fait personnel.
Parlons en peu plus, d’où part le livre. Il part d’un paradoxe développé en 1974 : le paradoxe d’Easterlin (économiste américain). Ce paradoxe met en avant le lien entre richesse et bonheur. En effet, si l’on regarde la courbe de croissance des USA on peut s’apercevoir que malgré son ascension, la courbe du « bonheur » ne suit pas la même pente.

The Easterlin Paradox


Comme si le développement du pouvoir d’achat, de l’amélioration des conditions de vie ne conduisait pas à une augmentation du « bonheur » ressenti par les individus. La croissance ne serait pas source de bien-être.
A un niveau donné, une fois qu’on dépasse un seuil de richesse, la croissance ne produira plus ses fruits en termes de bonheur engrangé.

Et donc on essaie de comprendre pourquoi ? Et on essaie de savoir si ce paradoxe est avéré ou non ? Voilà la trame du livre.

Il en ressort que notre bonheur trouve sa source d’une part dans la comparaison (on se compare à nos proches et plus particulièrement à nos collègues…) et dans nos habitudes on a soif de nouveauté, on s’habitue très vite à notre petit confort, qu’on prend pour acquis. Une nouveauté dans notre vie crée un surplus de bonheur qu’on aura oublié dans les 6 mois qui suivent. On se lasse…

Et on peut se dire à quoi s’échiner à créer de la croissance si cela ne nous rend pas plus heureux. Et ben, c’est pas si simple…

D’une part, l’être humain aime se fixer des buts et notre imaginaire est fortement corrélé à une élévation de notre niveau social global. Évoquer la décroissance c’est anxyogène. On est habitué à voir notre niveau de vie s’élevait, et même si nous ne ressentons pas ces effets de suite, on est rassuré de voir que notre richesse en globalité croît.

Elle évoque l’effet tunnel (un concept que je connaissais pas) de l’économiste Albert Hirschman.

Image illustrant l'effet tunnel

En gros, imagine : tu es bloqué dans un embouteillage, tu es sur la file de droite, ça n’avance pas. Mais tu vois que sur la file de gauche, ça avance, et bien, tu seras rassuré. Ca signifie que l’embouteillage va bientôt se décanter, qu’on va aussi retrouver une voie libre et rapide. Et on se sent mieux, on met la musique sur l’autoradio, on est détendu, tous va bien se passer, il suffit d’être patient, tous va bien tant qu’on y croit…
Et on y tient à notre effet tunnel, on veut penser en voyant des gens heureux que ça sera bientôt notre tour…

D’autre part, l’être humain a une forte aversion à la perte. On ne veut pas être déclassé. On veut conserver à tous prix notre niveau de vie, et notre niveau dans notre groupe social de préférence. Décroissance signifie baisse de revenus et ça on déteste. C’est inconcevable et source de grand malaise de voir notre niveau de vie chutait.

Enfin, on pourrait penser que les inégalités seraient source de frustration, l’être humain tendrait vers l’égalitarisme, ça le rendrait plus heureux. Pas vraiment… Il y a là un distingo à faire entre les sociétés fortement inégalitaires et les sociétés qui tendent à une égalisation des revenus. La culture américaine est marqué par l’idéologie que c’est le travail et les efforts qui rendent riches, donc les écarts de revenus sont justifiables. L’américain moyen ne trouve pas dans les inégalités une source de mal-être.

Indicateur mieux vivre et pib par habitant en 2012
Indicateur mieux vivre et pib par habitant en 2012

Et en France ? Et c’est comme ça, que termine le bouquin… Alors là, notre pays a un pib moyen proche de nos voisins, et bien on est plein marasme, on est pessimiste par rapport à l’avenir, décliniste, on ne croît plus en nos institutions…

Bilan du livre :

J’ai vraiment apprécié, j’ai appris des tas de choses sur l’être humain, du rapport entre PIB et bonheur (ce qui est quand même le but), vu de nouveaux concepts, on s’ennuie pas, on est surpris. Donc un bouquin à lire.
Mais on a envie d’en savoir plus, en particulier sur plusieurs points d’abord notre Hexagone. Pourquoi un tel décrochage ?
Et si on analysait par quantile obtient-on les mêmes résultats ? Les plus pauvres en Hongrie sont-ils nettement moins heureux que les plus pauvres en France ?
Et dernier point sur la décroissance, un changement d’imaginaire ne pourrait pas rendre la sobriété désirable ?

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